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Des souris et des livres !
15 décembre 2012

Les Bienveillantes (Jonathan Littell)

bienveillantes

Je ne savais pas quand j'ai choisi ce livre que j'aurai tant de mal à donner mon avis. J'y suis allé un peu la fleur au fusil...

Maximilien Aue (prononcez Aoeu) est un industriel d'origine allemande (sous une fausse identité française) qui fut, pendant la Seconde Guerre Mondiale, lieutenant-colonel (alias Obersturmbahnführer) SS. Il écrit ses mémoires (la date n'est pas précisée mais repère temporel, Adolf Eichmann avait été arrêté, donc après 1967) dans le but de témoigner, lassé, en quelque sorte, des témoignages à charge où l'allemand est nécessairement le méchant. Il entend montrer que l'on pouvait n'être qu'un rouage de la machinerie. Il reconnait, cependant, avoir dépassé certaines limites à la fin (c'est à dire la chute de Berlin fin avril 1945 mais qui ne les a pas dépassé à ce moment-là ? dixit le narrateur). Qu'en est-il exactement ?

Voici donc un jeune franco-allemand (sa mère est française, enfin c'est sujet à interprétation, elle est née en Alsace, durant l'annexion), idéaliste, intellectuel, en rupture familiale, qui, après des études de droit, intègre la SS en tant que juriste. Sa droiture intellectuelle lui vaut d'être placardisé assez rapidement à Berlin (il n'est pas politique pour un sou) et se retrouve loin des places-to-be. L'invasion de l'Union Soviétique a débuté, il se porte donc volontaire et se retrouve dans une unité SS en Ukraine (Einsatzgruppen).

Il faut savoir que la SS est l'organisation politique, idéalogique et armée entièrement dévouée au nazisme et à son chef, Adof Hitler. Elle était dirigée par Heinrich Himmler. L'une de ses missions est l'élimination des ennemis du Reich et notamment du peuple juif. C'est, entre autres, en Ukraine que les premières campagnes d'extermination de masse eurent lieu. Fin du (petit) cours d'histoire.

Maximilien est donc partie prenante des Aktions, semble t-il, à son corps défendant (au sens propre et figuré, il fait des cauchemars assez horribles et a fréquemment des coliques irrépressibles). Il n'y participe pas directement, il organise et assiste parfois, il n'exécute pas. Cela ne l'empêche pas de profiter des temps morts (sic) pour faire du tourisme. Lorsque l'ordre est donné d'exécuter femmes et enfants, il reste à son poste (il dit ne pas savoir pourquoi) contrairement à certains de ses "collègues" qui demandent leur mutation et continue à "souffrir".

Il progresse dans la hiérarchie SS, Hauptsturmführer (capitaine) pour son "reportage" sur l'éradication des Juifs de Kiev (33741 morts en 2 jours, les Allemands faisaient un décompte précis...), Sturmbannführer (commandant) après sa blessure à la tête (une balle lui traverse la tête sans faire de dégâts durables) à Stalingrad où son manque d'esprit politique l'avait envoyé

C'est aussi l'occasion pour le narrateur de nous dévoiler des pans de sa vie et de sa personnalité et c'est à ce moment qu'on comprend certaines choses. Maximilien a une soeur jumelle, Una, qu'il aime à la folie, au point de commettre (plusieurs fois) l'irréparable. Sa passion obsessionelle le conduira jusqu'au bord de la folie (au bord ? vraiment ? Je vous laisse juger). Séparé de sa soeur, il devient (?) homosexuel (imaginez la situation, il est SS) car il n'aime qu'une seule femme, déteste sa mère car elle a abandonné son père (en fait il a disparu), hait évidemment son beau-père, français, petit bourgeois. Et le voilà lancé dans le tourbillon de la guerre, avec ce bagage...

J'avoue avoir eu, au début, une certaine compassion pour Maximilien, même si dès l'introduction, il tient des propos qui m'ont mis mal à l'aise. En Ukraine, il a l'air de souffrir de la situation, il s'interroge sur la nécessité de faire subir tant de souffrances. Oui, il n'est physiquement pas bien mais c'est parce qu'il est confronté à la réalité des choses. Il reste convaincu que le peuple juif est l'ennemi du Reich et doit donc être éliminé, d'une manière ou d'une autre (mais si possible une qui l'impliquerait moins). Lorsqu'il s'occupera des camps d'extermination, il regrettera le manque d'organisation qui provoque la mort de trop de prisonniers avant d'avoir été utiles (en travaillant, la mort restant tout de même ce qui les attend). Mais pas un regret. Sa santé mentale ne s'arrangeant pas avec le temps, il commettra des actes horribles (les limites dépassées à la fin ne sont peut-être pas les pires...).

Je ne vous raconterai pas comment cela se termine, même si je n'en ai pas aimé le ridicule (l'auteur tout comme le lecteur était-il pressé d'en finir ?) ni l'immoralité. Les Bienveillantes est un livre difficile à aborder tant par la forme que par le fond. Il faut être prêt à lire de l'allemand, pas toujours documenté, à supporter les horreurs de la guerre, décrites ici sans concessions ni fioritures et les actes, les pensées intimes du personnage principal exprimés à la première personne. Plus j'avançais dans la lecture, plus mon malaise augmentait. Je ne peux pas le conseiller, ni le proscrire, ce n'est pas pour rien qu'il a reçu le prix Goncourt. Bref pour lecteurs avertis.

Et la question initiale, me direz-vous ? Difficile d'y répondre tant Maximilen Aue n'est pas le monsieur Tout-le-Monde pour lequel il voudrait se faire passer, et donc le pseudo-témoignage que constitue ce livre ne peut en être une réponse.

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Commentaires
C
Je n'ai pas eu le courage de le lire. Et le malaise perceptible dans ton commentaire ne m'en donne pas davantage envie. Décidément, je passe mon tour !
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Des souris et des livres !
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